Une table nichée au cœur d’un hôtel de charme à quelques mètres de la place des Vosges. Bienvenu au restaurant Anne du Pavillon de la Reine.
L’hôtel du Pavillon de la Reine est pour le moins discret. Il passerait presque inaperçue entre deux galeries d’art de la Place des Vosges. Il suffit pourtant de passer un joli porche en pierre pour pénétrer dans un charmant patio arboré, et s’extraire presque aussitôt, de l’agitation de la ville. Atmosphère feutrée, calme des lieux, cet hôtel 5*, designé par Didier Benderli de l’agence Kerylos, appelle à la sérénité et donne aisément le sentiment d’avoir quitté Paris. À l’entrée de l’hôtel, sur la droite, un salon bibliothèque accueille depuis quelques mois maintenant, la dizaine de tables d’un restaurant gastronomique dont on va très vite parler.
UNE GASTRONOMIE EXTRÊMEMENT SOIGNÉE
Au piano de ce restaurant Anne, Édouard Chouteau, jeune chef talentueux, réussit le pari, dans une cuisine de poche, de dresser des assiettes de hautes volées. Sous la coupe de Mathieu Pacaud, fils de Bernard, dont le restaurant triplement étoilé se situe de l’autre côté de la place, il s’applique à l’exécution d’une carte courte, composée de produits de saison traités avec le plus grand soin. Inutile donc ici d’évoquer la maitrise des cuissons ou des assaisonnements car ils apparaissent comme la base. Ici le travail est ailleurs, notamment dans ces assiettes au dressage appliqué, cohérente et harmonieuse.
À LA CARTE
Édouard Chouteau, bercé dès son plus âge dans l’ambiance de l’hôtel-restaurant familial, a semble-t-il très vite été piqué par le virus de la cuisine. Curieux, intéressé par cet univers dont il s’est nourri, il est, entre-autre, passé par le Bristol avant d’affirmer, au restaurant Anne sa propre personnalité. En un an il a créé le restaurant, mis au point une carte et un style de cuisine parfaitement maitrisé. Ici tout arrive par paire. Le chef joue admirablement les compléments de genre, et propose à chaque assiette, son attribut de saveur. Exemple avec ces gnocchis de petits pois, petit pois frais, cécina et vieux Parmesan, escortés d’une fine tartelette à la mousse de petit pois coiffée d’un élégant parterre de fleurs et de pétales assaisonnées de d’une huile de géranium dont les notes rappellent en bouche celles de la rose et du litchi…
ÔDE À LA GOURMANDISE
chair de tourteau et asperge blanche Langoustine et jus d’herbes
Parmi les entrées, la chair d’araignée de mer, œuf mimosa, asperge blanche, beurre blanc au caviar et segments de pamplemousse ; une véritable ode au printemps. Asperge croquante dont la fraicheur explose en bouche, beurre blanc d’une incroyable gourmandise, et saveurs délicates de la chair d’araignée décortiquée. Les langoustines sont un véritable moment d’anthologie. Présentées en cocote, charnues, parfaitement cuites, servies avec un jus d’herbes savoureux, elles se délectent en fermant les yeux pour mieux apprécier la délicatesse de ses chairs. Dans le ramequin qui les accompagne, une salade d’une remarquable fraicheur (comme tout juste sortie du jardin) assaisonnées d’un ceviche de langoustines en tous points remarquable. La généreuse tranche de foie gras, présentée dans un bouillon de caractère, juste condimentée de morilles taillées en bracelets est incroyable de fraicheur et de précision de cuisson… Les saveurs du lobe s’harmonisent à la perfection avec celles du bouillon, et les deux morilles entières farcies de foie de canard et de poulet, crouton de pain et frisée servies en plus, ne sont que gourmandise.
À QUAND L’ÉTOILE
Nous pourrions citer tous les plats de la carte du restaurant Anne, il n’y a rien à redire, ou si peu. Un peu plus de « finesse » pour cette tarte où se mêle chèvre frais, rhubarbe et hibiscus, mais voilà tout. On se délectera jusqu’au bout de ce baba au sirop de passion – frais et légèrement acidulé – escorté d’une chantilly légère parsemée de dragées concassées et de fraises des bois. Et que dire de ce splendide soufflé au chocolat, moelleux sur les bords, crémeux, onctueux au centre, régressif, savoureux et sans excès de sucre, si ce n’est que c’est une merveille. Le sorbet framboise qui l’accompagne laisse exploser les parfums du fruit en bouche et quelques échos de litchi. Un repas admirable, et le travail d’un chef auquel le guide rouge devrait vite s’intéresser.
RESTAURANT ANNE
28 Place des Vosges
75003 PARIS
01 40 29 19 19